Le jazz revient rythmer la cité de Bartholdi au mois de septembre 2025, grâce au Colmar jazz festival et au Jazz off. Pour l’occasion, le Pôle média-culture Edmond Gerrer vous propose une sélection de CDs en lien avec la programmation.
Écoutez ici les titres phares évoqués dans l’article
Bøl, Where Glitter Goes (2025)
Fraîchement arrivé dans nos bacs, venez découvrir l’album Where Glitter Goes du groupe Bøl, venu d’Occitanie. Se définissant comme un groupe de transe-rock et de turbo-jazz, Bøl se situe aux frontières lointaines du jazz-rock, penchant légèrement vers le rock alternatif, saupoudré d’une pincée de krautrock et d’un soupir de musique électronique. Entre accents épiques et élans mystiques, Bøl compose un chaos organisé. Construit sur le principe de bourdon, de trilles et d’arpèges entêtantes et de cuivres grinçants et dissonants, le résultat final a pour but de mettre l’auditeur dans un état de transe ou de méditation.
Bøl se produira le 19 septembre à 21h au Grillen dans le cadre du festival Jazz off.
À ne pas manquer !
Dans le cadre du Jazz off, festival partenaire du Colmar jazz festival, venez écouter le duo guitare-voix d’inspiration musiques du monde Lesly & Raïlo à l’espace Musique Live, au 2e étage du Pôle média-culture (entrée libre dans la limite des places disponibles). Rendez-vous le 13 septembre à 16h.
Adèle Viret Quartet, Close to the Water (2024)
Avec Close to the Water, la violoncelliste Adèle Viret et son quartet vous invitent à un séjour hors-saison au bord de la mer, aux frontières de l’ethno-jazz et de la musique de chambre. L’album retranscrit à merveille l’univers marin : son atmosphère mystérieuse, sa douceur autant que sa brutalité, la régularité du mouvement des vagues, la puissance du ressac… Adèle Viret semble martyriser avec douceur son violoncelle, variant les textures et les techniques de jeu (les cordes sont frottées, grattées, pincées…).
Au piano et au Fender Rhodes, Wajdi Riahi joue sur les contrastes, entre un son très réverbéré qui le situe à distance des autres instruments et inversement un jeu tout en puissance et en impact. La trompette d’Oscar Viret est aérienne, s’inspirant des sonorités méditerranéennes. A la batterie et aux percussions, Pierre Hurty cherche à retranscrire le champ lexical sonore de la mer sans s’affranchir d’un jeu jazz (quoique lorgnant parfois sur des rythmiques rock).
Plutôt que de s’aventurer en territoire conquis, toutes les suites d’accords, les mélodies, cherchent à aller dans des directions où on ne les attend pas, ce qui n’en finit pas de nous surprendre.
Adèle Viret Quartet, le 21 septembre à 20h30 au Théâtre municipal.
Vincent Peirani, Living Being (2015) & Living Being II (2018)
Quelques notes d’accordéon accompagné par un Fender Rhodes et son tremolo légendaire, nous voici dans l’ambiance. Dès le deuxième titre, Living Being (premier du nom) nous propulse en plein jazz-rock : batterie jazz, arpèges au clavier, accords langoureux à l’accordéon, mélodie virevoltante au saxophone… Étonnant, me direz-vous, de trouver de l’accordéon dans une telle formation ? C’est pourtant ce qui fait toute son originalité.
Le duo Vincent Peirani/Émile Parisien (saxophone) fait des étincelles et nous embarque dans un voyage entre compositions et réinterprétations (Jeff Buckley, Michel Portal), entre moments contemplatifs (« On The Heights ») et détours par le rock progressif (certains passages semblent tout droit sortis d’un album de Van Der Graaf Generator).
Living Being II explore davantage les territoires rock, consacrant notamment un tiers de l’album à la réinterprétation de deux morceaux phares de Led Zeppelin, « Kashmir » et « Stairway To Heaven ». Cette deuxième itération de la formation semble prendre plus de libertés, entre détours pop et folk (le contemplatif « Enzo » surprend par son inspiration celtique), compositions fantaisistes (« Le Clown Sauveur De La Fête Foraine »), et réinvention de pièces baroques (« What Power Art Thou », de Purcell, devient un titre jazz-rock totalement hypnotique). Somme toute, nous voici loin du cliché des musiques de bal et de guinguettes.
Retrouvez Living Being le 23 septembre à 20h30 au Théâtre municipal. La première partie sera assurée par le groupe Crozphonics, avec Charles Kieny à l’accordéon.
Theon Cross, Fyah (2019)
Pour son premier album, Theon Cross s’aventure à la croisée de l’afrobeat et de la house music (hybridation symptomatique de tout un pan de la nouvelle scène jazz londonienne, qu’on retrouve aussi chez Ezra Collective), sans perdre d’ouïe les racines fanfaronnes de son instrument : le tuba. Enregistré en analogique, Fyah sublime le timbre chaud et saturé, parfois distordu (sur « Radiation »), de cet instrument au potentiel méconnu.
Cross s’en amuse, d’ailleurs, sur « Candace of Meroe ». Le tubiste britannique, qu’on a pu entendre aux côtés de Shabaka Hutchins (au sein des Sons of Kemet) ou de Thom Yorke (sur son projet The Smile), transcende les conventions et flirte aussi bien avec un jazz doux (« Letting Go ») qu’avec de la trap (« Panda Village » surprend).
Qu’il se lance dans un solo groovy ou qu’il dialogue avec le saxophone ténor de Nubya Garcia, Theon Cross s’impose avec cet album comme l’un des compositeurs et instrumentistes les plus originaux des deux dernières décennies.
Venez taper du pied et secouer la tête le 27 septembre à 20h30 à la salle de spectacle Europe.
Camille Bertault, En Vie (2016)
Dans la digne lignée des grandes chanteuses de jazz, Camille Bertault propose un jazz joyeux, espiègle, rêveur, mélancolique. Avec sa voix douce et feutrée (non sans une certaine puissance), la chanteuse impressionne par la virtuosité de son scat et la mélodicité de ses vocalises. Aussi inspirant qu’une soirée estivale, En Vie invite au songe et à la détente. L’album nous embarque dans un univers fantaisiste et coloré que ne renierait pas Jacques Demy.
Au demeurant, hormis quelques reprises (Ellington, Hancock, Shorter…), En Vie semble un hommage implicite à Michel Legrand : « Double Face » n’est pas sans rappeler la « Chanson des Jumelles » des Demoiselles de Rochefort (Demy, 1967) et « Tatie Cardy » nous donne fortement envie de cuisiner un cake d’amour avec Peau d’Âne (Demy, 1970).
Camille Bertault, le 28 septembre à 20h30 à la salle Europe.
À ne pas manquer !
Dans le cadre du Colmar jazz festival, le 27 septembre à 15h aura lieu la conférence « Jazz et musique contemporaine : interférences et métissages depuis 1960 » à l’auditorium du Pôle Média-Culture.
Retrouvez la programmation complète du Colmar jazz festival, du 18 au 28 septembre 2025, sur colmar.fr/jazz.
Le Jazz off, quant à lui, se tient du 11 au 20 septembre. Découvrez la programmation.