Thibaut Welchlin, 46 ans, est le chef costumier de l’Opéra national du Rhin, basé à Strasbourg. Colmarien d’origine, il est très attaché au Théâtre municipal de Colmar. Un lien qu’il tisse depuis son enfance.
« Je l’aime, ce théâtre », souffle Thibaut Welchlin, en jetant un regard plein d’émotions en direction de l’édifice de 1849. Le Théâtre municipal est le fil rouge de sa vie, le berceau de sa passion pour l’art dramatique, sa « Madeleine de Proust ». « Chaque recoin fait écho à un souvenir, une personne, une évasion par le rêve. »
C’est sa famille qui l’initie au théâtre, car de nombreux membres sont impliqués dans cet univers. « J’avais 3 mois quand j’ai fait mes premiers pas sur scène, ici même », raconte son fils. S’il ne marchait pas encore à cet âge-là, Thibaut Welchlin figurait dans les productions de contes pour enfants. Il a en quelque sorte marché sur les traces de son père Gérard, qui a débuté sa carrière d’acteur à l’âge de 10 ans, sur ces mêmes planches. « Ces expériences ont planté une graine qui m’a poussé vers mon métier actuel », raconte le costumier.
De l’architecture à la création de costumes
Thibaut Welchlin a étudié au lycée Saint-André de Colmar, en filière scientifique, puis s’est orienté en études d’architecture à Strasbourg. Le Colmarien s’est ensuite raccroché à son fil d’Ariane et a intégré l’École nationale supérieure d’art dramatique, section scénographie et création de costumes. « Ce n’était pas un choix conscient, j’étais curieux, je souhaitais renforcer mes connaissances dans ce domaine. » Il en avait le goût, ses pairs lui en ont reconnu le talent.
Au cours de sa carrière, Thibaut Welchlin a travaillé pour plusieurs théâtres nationaux, le Théâtre du Châtelet à Paris, l’opéra de Pékin, ou encore le Mariinsky à Saint-Pétersbourg. « J’ai eu l’honneur de dessiner le dernier costume de scène de Laurent Terzieff, un des monstres sacrés du théâtre. » L’acteur incarnait le rôle principal dans Philoctète d’après Sophocle, au Théâtre de l’Odéon à Paris, en 2009.
« Les costumes doivent servir le récit »
Cela fait 8 ans que Thibaut Welchlin a pris ses fonctions de chef costumier à l’Opéra national du Rhin. En tant que tel, il dirige les ateliers et gère le magasin de costumes. Cette saison, il signe les costumes de Don Giovanni aux enfers, Sérénades et du Journal d’Hélène Berr.
Dans le cadre de son métier, Thibaut Welchlin a la chance de travailler régulièrement au Théâtre municipal de Colmar, où se jouent les productions de l’Opéra national du Rhin. Il a même endossé son costume d’acteur pour donner la réplique à son père dans la production “A bummel durich alt Colmar” du Théâtre alsacien de Colmar, en février 2024. Un nouvel acte de son histoire si particulière avec le Théâtre.
Carte d’identité
Nom : Welchlin
Prénom : Thibaut
Ses lieux préférés à Colmar : le Théâtre municipal
Son artiste préféré : Moïdele Bickel, créatrice de costumes du metteur en scène Patrice Chéreau (La Reine Margot) ; Michael Haneke, cinéaste (Le Ruban blanc), qu’il a eu la chance d’assister dans ses jeunes années professionnelles.
Son influence musicale du moment : « J’apprécie la poésie musicale de Calogéro, la mélancolie de Tchaïkovsky, la profondeur de Bach, et le pétillant de Kylie Minogue », détaille Thibaut Welchlin.
« J’ai connu ces costumes »
Fin septembre 2023, environ 3000 costumes ont quitté le Théâtre municipal de Colmar pour rejoindre les 90 000 pièces conservées à l’Opéra national du Rhin, à Strasbourg. Ce don a notamment pour objectif de mieux les conserver et les mettre en valeur. Ces costumes ont une valeur patrimoniale : de nombreux datent du début du 20e siècle. Certaines typologies de personnages sont représentées parmi ces costumes : on retrouve par exemple la Traviata, Falstaff, ou encore Brunehilde. Ce sont les témoins d’une époque où le Théâtre municipal fabriquait les costumes sur place. Aujourd’hui, la structure colmarienne est un théâtre d’accueil. Depuis la fin du 20e siècle, les compagnies arrivent et repartent avec leur propre matériel.
Le chef costumier, Thibaut Welchlin, gardera un œil attentif sur les pièces colmariennes. « Plus jeune, j’ai connu ces costumes, tout comme les habilleuses qui m’ont ouvert les portes des espaces de stockage qui, pour moi, étaient merveilleux. Comme un grenier magique. »
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« Le costume doit servir le récit »
Le rôle du chef costumier est un peu celui d’un chef d’orchestre. À chaque nouveau spectacle, Thibaut Welchlin reçoit les intentions de l’équipe artistique sous formes de dessins ou de maquettes. Il étudie ensuite les possibilités de réalisation des costumes, au vu du budget et des ressources de l’Opéra national du Rhin. Puis la concrétisation commence. Dans les ateliers de confection, les coupeuses et les couturières s’affairent à créer les pièces demandées. Chaque année, 1700 silhouettes de costumes sortent de ces ateliers.
Rien n’est laissé au hasard. « Le costume, sa forme et sa texture, doit servir le récit, donner une impression du personnage. Il faut qu’il fasse corps avec le personnage et qu’il s’efface dans sa justesse », souligne Thibaut Welchlin. Tout en permettant aux interprètes de bouger et de s’exprimer librement.