Des milliers d’Alsaciens et de Mosellans incorporés de force pendant la Seconde guerre mondiale sont morts sans que l’on connaisse leur lieu d’inhumation. Claude Herold, habitant à Turckheim (près de Colmar), s’est donné pour mission de localiser leur sépulture.
L’incorporation de force a volé 7 personnes à la famille Herold. « Mon père a perdu 3 frères et un cousin, ma mère un oncle et deux autres membres plus lointains », détaille Claude Herold. Enfant, il a été bercé par ces histoires, dont les membres de sa famille parlent souvent. Mais son intérêt s’est vraiment éveillé à partir de ses 28 ans.
« C’était en 1984. Mes parents me demandent de refaire les lettres du monument funéraire avec de la peinture or », raconte-t-il. « J’étais en plein travail et deux dames, qui déambulaient dans le cimetière, viennent me voir. Elles me posent des questions sur mes oncles, mais je n’ai pas les réponses. Dans leur regard, je vois de l’étonnement. J’avais honte ! »
Dans la foulée, il se lance dans les recherches. Il veut en savoir plus sur Ernest, Albert et René, ses oncles incorporés de force et disparus. Petit à petit, il localise la sépulture de son oncle René en Italie.
De fil en aiguille, il répond aux demandes de collègues, d’amis et de familles qui souhaitent identifier le lieu de sépulture de leurs ancêtres. Claude Herold s’appuie sur diverses sources, notamment sur les archives militaires de Caen. Dans sa quête, il s’est entouré de passionnés comme l’historien Nicolas Mengus, auteur du site malgre-nous.eu.
En 2016, grâce au service de recherche de la Croix rouge allemande, il récupère les fiches des 1,3 million de soldats allemands portés disparus pendant la Seconde guerre mondiale. Parmi eux, 12 000 Alsaciens et Mosellans. Claude Herold extrait leurs fiches. Huit bâches rassemblant ces visages et ces noms, de 36 m au total, sont imprimées et régulièrement exposées.
Au final, la honte ressentie en 1984 s’est transformée en passion. Dans son bureau, les étagères débordent d’ouvrages historiques et de classeurs. Chaque jour, le retraité consacre 3 à 4 heures à ses recherches. Il est aussi bénévole dans plusieurs associations.
Son travail n’a pas trait qu’au papier. Au contraire, il est ancré dans l’humain. Claude Herold aide à retrouver des oncles, des pères, des cousins. Ses efforts permettent de répondre à des questions. Même si, parfois, ses recherches n’aboutissent pas. « Je suis content quand je peux aider les gens », dit-il simplement.
L’incorporation de force
Au cours de la Seconde Guerre mondiale, le 25 août 1942, le Gauleiter Robert Wagner signe le décret qui incorpore de force les Alsaciens à l’armée allemande. Les Alsaciens et Mosellans sont contraints de s’y soumettre, sous peine de terribles représailles. Beaucoup combattent et meurent sur le front de l’Est.
En 2023, à l’occasion de la cérémonie commémorative du décret instaurant l’incorporation de force, les bâches listant les 12 000 incorporés de force alsaciens et mosellans disparus étaient visibles sur la place du 2-Février, à Colmar.